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Urbanisme : Transaction non enregistrée dans le délai et sanction (L.600-8 du code de l'urbanisme)

La Société d'aménagement de gestion et de commercialisation (Sagec) obtint un permis de construire qui fut attaqué par un particulier "M. E". Une transaction fut signée entre eux aux termes de laquelle, la Sagec versa la somme de 35.000 euros en contrepartie du désistement de son recours.


Sur le fondement des dispositions combinées de l'article L.600-8 du code de l'urbanisme et 635, 1, 9° du code général des impôts, la transaction n'ayant pas été enregistrée dans le délai d'un mois, la Sagec assigna M. E en remboursement de la somme versée.


Deux thèses s'opposaient concernant l'obligation sanctionnée par la répétition de l'indemnité versée : le défaut d'enregistrement de la transaction doit-il, seul, être démontré ou le non-respect du délai d'un mois pour procéder à cet enregistrement suffit-il à justifier la répétition des sommes ?


Les juges du fond - tant en première instance qu'en appel - ont rejeté l'argumentation de la Sagec et rejeté ses demandes, considérant ainsi que la sanction de la répétition des sommes versées ne saurait être la conséquence du non-respect du délai d'enregistrement.


Statuant sur le pourvoi de la Sagec, la Cour de Cassation jugea que la Sagec était fondée à obtenir la répétition de la somme payée en exécution de la transaction non enregistrée dans le délai légal d'un mois :


"Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que l'article L. 600-8 du code de l'urbanisme ne précise pas que la transaction non enregistrée dans le délai d'un mois est réputée sans cause et que la société Sagec ajoute au texte en soutenant que la sanction de la répétition des sommes versées est la conséquence du non-respect de ce délai, qu'en outre, la cause d'une transaction se trouve dans les concessions réciproques des parties, de sorte que l'omission de cette simple formalité de publicité ne peut avoir pour effet de la supprimer, la transaction ayant, de surcroît, été exécutée après l'expiration du délai et que, le but du législateur de favoriser la fluidité des opérations de construction, la transparence fiscale et l'identification des opposants d'habitude faisant la profession de recours contre les permis de construire apparaît comme la seule finalité de l'enregistrement, quel que soit le délai dans lequel celui-ci intervient ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société Sagec était fondée à obtenir la répétition de la somme payée en exécution de la transaction non enregistrée dans le délai légal, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;"


L'arrêt commenté vient confirmer celui, publié au Bulletin, du 20 décembre 2018 (Cour de Cassation, n°17-27.184) :


"Mais attendu qu’il ressort de la combinaison des articles L. 600-8 du code de l’urbanisme et 635, 1, 9° du code général des impôts que la formalité de l’enregistrement doit être accomplie dans le mois de la date de la transaction et que, à défaut d’enregistrement dans ce délai, la contrepartie prévue par la transaction non enregistrée est réputée sans cause ;

Que considérer que le délai d’un mois est dépourvu de sanction et admettre ainsi qu’une transaction ne pourrait être révélée que tardivement serait en contradiction avec l’objectif de moralisation et de transparence poursuivi par le législateur ;

Que ce délai d’enregistrement est un délai de rigueur qui ne peut être prorogé et dont l’inobservation entraîne l’application de la sanction légale, quel que soit le motif du retard ;"


***


Pour mémoire, l'article L.600-8 du code de l'urbanisme (dans sa rédaction antérieure à la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 applicable à l'espèce) dispose que :


"Toute transaction par laquelle une personne ayant demandé au juge administratif l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'engage à se désister de ce recours en contrepartie du versement d'une somme d'argent ou de l'octroi d'un avantage en nature doit être enregistrée conformément à l'article 635 du code général des impôts.


La contrepartie prévue par une transaction non enregistrée est réputée sans cause et les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des avantages consentis sont sujettes à répétition. L'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l'obtention de l'avantage en nature.


Les acquéreurs successifs de biens ayant fait l'objet du permis mentionné au premier alinéa peuvent également exercer l'action en répétition prévue à l'alinéa précédent à raison du préjudice qu'ils ont subi.".


Ces dispositions, issues des préconisations du rapport du Président Labetoulle remises au Ministre de l'Egalité des Territoires et du Logement le 25 avril 2013 et créées par l'ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013, furent complétées par la loi n°2018-1021 précitée du 23 novembre 2018 :
- Le champ de la transaction est désormais ouvert aux personnes qui n'ont pas encore engagé de recours contentieux mais qui ont l'intention de le faire. 
- Le délai d'un mois pour enregistrer la transaction, visé à l'article 635 du code général des impôts, est rappelé (Civ. 3e,20 décembre 2018, n°18-27.184 : caractère interprétatif sans innovation).
- Les associations ayant recours à la transaction sont privées de la possibilité d'obtenir le versement d'une somme d'argent, sauf si elles agissent pour la défense de leurs intérêts matériels propres.

La transaction est un mode de règlement non juridictionnel de résolution des différends - usuel dans le contentieux des autorisations d'urbanisme - dont la définition est rappelée à l'article L.423-1 du Code des relations entre le public et l'administration :


"Ainsi que le prévoit l'article 2044 du code civil et sous réserve qu'elle porte sur un objet licite et contienne des concessions réciproques et équilibrées, il peut être recouru à une transaction pour terminer une contestation née ou prévenir une contestation à naître avec l'administration. La transaction est formalisée par un contrat écrit."


Arrêt Commenté : Cour de Cassation, 3ème chambre civile, 19 mars 2020, n°19-10393



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