Les régimes des Associations syndicales libres (ASL) et de la domanialité publique sont incompatibles depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004. En effet, l'article 6 de l'ordonnance précitée dispose que “les créances de toute nature d'une association syndicale de propriétaires à l'encontre de l'un de ses membres sont garanties par une hypothèque légale sur les immeubles de ce membre compris dans le périmètre de l'association”.
Cet article est donc en contradiction avec le principe posé à l’article L.3111-1 du Code général des collectivités territoriales selon lequel : “Les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L.1, qui relèvent du domaine public, sont inaliénables et imprescriptibles.”
Cet arrêt est ainsi l’occasion de préciser les conséquences de ce passage à l’incompatibilité des régimes pour les biens du domaine public d'une personne publique inclus dans le périmètre d'une ASL avant l'ordonnance de 2004.
En l’espèce, il s’agissait pour le juge administratif de se prononcer sur l'appartenance au domaine public communale de parcelles situées dans le périmètre d’une ASL et dans la positive, de se prononcer sur la compatibilité de cette appartenance avec les obligations en tant que propriétaire au sein d'une ASL.
Tout d’abord, le Conseil d’Etat précise que l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 1er juillet 2004 précitée n’a pas eu pour conséquence d’entraîner le déclassement des dépendances appartenant au domaine public des personnes publiques.
A contrario, une dépendance incluse dans le périmètre d'une ASL qui, à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance, n'appartenait pas au domaine public d'une personne publique ne peut devenir une dépendance de ce domaine, alors même qu'elle serait affectée à l'usage direct du public ou qu'elle serait affectée à un service public et aurait fait l'objet d'aménagements propres à lui conférer cette qualification.
Le Conseil d’Etat avait, le 23 janvier 2020 (n°430192), d’ores et déjà rappelé que le régime des associations foncières urbaines libres (AFUL), tel qu'il découle de l'article 6 de l'ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004 et de l'article L.322-9 du code de l'urbanisme, est incompatible avec celui de la domanialité publique, notamment avec le principe d'inaliénabilité de sorte que “Par suite, des locaux acquis par une personne publique dans un immeuble inclus dans le périmètre d'une association foncière urbaine libre, fût-ce pour les besoins d'un service public, ne peuvent constituer des dépendances de son domaine public. Dès lors, en jugeant que la circonstance que les lots litigieux soient compris dans un immeuble géré par une association foncière urbaine libre ne faisait pas obstacle à leur appartenance au domaine public, le tribunal administratif a également commis une erreur de droit.”
En l’espèce, le Conseil d’Etat vient nuancer cette incompatibilité de principe dès lors, qu’après avoir constaté que les parcelles en cause appartiennent au domaine public de la Commune de Clamart, il considère que cette appartenance est compatible avec leur inclusion dans le périmètre de l’ASL. En revanche, cette double appartenance a pour conséquence l'impossibilité pour l'ASL de mettre en oeuvre, pour le recouvrement des créances qu'elle détient sur la personne publique propriétaire, la garantie de l'hypothèque légale sur ces biens inclus dans le périmètre et appartenant au domaine public.
A retenir :
→ Pour les biens inclus dans le périmètre d'une ASL et qui, à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er juillet 2004, n’appartenaient pas au domaine public d'une personne publique (ou toute acquisition postérieure) : ces biens ne peuvent appartenir à leur domaine public alors même qu'ils seraient affectés à l'usage direct du public ou qu'ils seraient affectés à un service public et auraient fait l'objet d'aménagements propres à lui conférer cette qualification.
→ Pour les biens inclus dans le périmètre d'une ASL et qui, à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du 1er juillet 2004, appartenaient au domaine public d'une personne publique : sauf procédure de déclassement, ces biens appartiennent toujours à leur domaine public. L’ASL ne pourra mettre en oeuvre la garantie de l’hypothèque légale à l’encontre de ces biens.
Arrêt Commenté : Conseil d'Etat, 10 mars 2020, n°432555, publié au Recueil).
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